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S’amuser à photographier l’art

Vous trouverez de nombreux conseils pour photographier des tableaux de manière “neutre”. Par neutre, j’entends photographier l’œuvre comme on la voit dans les livres ou sur le net, à savoir pour résumer :  lumière du jour ni trop forte (attention aux vilains reflets) ni trop faible ; sans flash, cadrage de manière à éviter les distorsions sur les bords, temps de pose court, trépied. Et hop, vous allez pouvoir avoir la même photo que tout le monde, celle du catalogue d’exposition – enfin presque parce que vous n’aurez pas forcement toutes les conditions optimales réunies, ou que vous raterez l’opération de retouche des couleurs.

Le résultat, dans les livres ou sur Internet, est un art lisse, prêt à mettre en poster. C’est celui qu’on nous donne à voir et qu’on a assimilé à tel point qu’on veut le reproduire. Mais il n’est pas ‘neutre’, c’est un parti pris.

Je vous montre ici que ce point de vue est un parti pris – certes généralisé – et qu’il ne s’applique pas à tous les travaux et que la diversité devrait être encouragée pour photographier des œuvres d’art.

Ne gommez pas le relief des toiles

Avant la  fin du 19ème siècle, il est de bon ton de produire des toiles lisses, sans coups de pinceaux apparents qui sont perçus comme des défauts.  Les impressionnistes, ou des artistes comme Vincent Van Gogh n’hésitent pas à s’opposer dans leurs créations à ce principe. Le tableau ci-dessous montre le geste de Van Gogh, on ressent la matière, et la couleur reste très présente [pour un petit zoom sur Van Gogh, c’est ici].

Peinture Vincent Van Gogh
Vincent van Gogh –
Acacia en fleurs 1890
Nationalmuseum, Stockholm

Les photos prises avec une lumière uniforme ont pour effet de gommer les reliefs des tableaux. Or, les empâtements sont une valeur incontestable de l’œuvre, elles donnent de nombreuses informations sur le travail de l’artiste.

En prenant les tableaux avec une lumière rasante et/ou en se mettant en oblique par rapport au tableau, le relief du tableau est mis en évidence par la photo.

Photo de l’un de mes tableaux en lumière rasante

J’insiste ici sur les tableaux, mais pour les œuvres en relief, les raisons pour les prendre sous différents angles sont encore plus nombreuses.

Montrez la taille des œuvres

Dans un livre, vous retrouverez au même format le gigantesque plafond de la chapelle Sixtine (40,5 x  14 m),  un grand tableau pointilliste tel ‘un dimanche après-midi à l’île de la Grande Jatte’ de Seurat (208 x 308 cm) et le petit tableau de Courbet ‘l’Origine du monde’ (46 x 55 cm).

points colorés - pointillisme
Détail d’un tableau pointilliste

Or, cette impression d’un format unique pour les œuvres est très trompeuse et laisse présager de bonnes surprises lors de visites dans les musées. Prenons l’exemple d’un tableau pointilliste, la photo de l’ensemble fait le travail du mélange des couleurs pour nous. Dans la réalité, quand on arrive face à ce tableau, notre œil voit de loin l’ensemble du tableau, en se rapprochant mais à une distance ‘classique’ pour regarder un tableau, il n’est pas nécessaire d’avoir le nez dessus et de loucher, on aperçoit les détails avec la segmentation des couleurs.

Une manière de se représenter la taille d’un tableau est la mise en situation, pour permettre de comparer par rapport à des tailles connues. C’est fait de manière parfois froide sur certaines galeries, avec un salon fictif en format de référence.

Mais l’humour n’est pas interdit. Et à ce sujet, la mise en valeur, sur sa boutique Etsy, de Qchinsky me plait vraiment :

tableau avec deguisement nounours

Parfois il est bon de ne pas se prendre au sérieux !

Le statue selfie : quand les statues se prennent elles-mêmes en photo

L’exemple de photo parle de lui-même. Une fois de plus, il s’agit de faire évoluer notre point de vue, de le mettre dans un contexte actuel, de s’amuser.

statue selfie
Statue selfie du Getty Museum à Los Angeles (photo FB)

Alors, à bas les règles pour prendre une photo parfaite des œuvres d’art ! Osez faire preuve de créativité. Utilisez les codes de la photographie pour montrer ce qui vous surprend, vous plait dans une œuvre. Avec flash, décentré, sur la tranche, de dos, de travers, de près, de très loin : la seule limite c’est votre envie.

 

3 réflexions au sujet de « S’amuser à photographier l’art »

  1. Maintenant que j’ai lu ton article, je suis prête a faire quand tu veux une séance de photos de tes œuvres, avec comme mot d’ordre de ne pas se prendre au sérieux !!!!

    1. @lilie laisse parler la créativité en toi :-). Tu peux jongler avec, les empiler pour les prendre sur la tranche uniquement (j’aurai dû faire cette photo de la série) 😉 Si ça me plait, je publierai un article avec les plus talentueuses photos.

  2. […] J’ai compris à ce moment-là qu’on ne pouvait connaître un tableau qu’en y étant confronté dans la réalité. Cette idée de décalage entre une œuvre et sa représentation sur les écrans et les livres, ne m’a pas quittée depuis, et je l’évoque d’ailleurs régulièrement sur mon blog. […]

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