J’ai présenté le travail de Gwenn Seemel dans un précédent article. Je l’ai contacté pour lui proposer de répondre à mes nombreuses et curieuses questions.
Elle m’a répondu avec franchise et beaucoup de clarté.
LE PROJET D’ARTISTE
[Elize] Comment avez-vous décidé d’être artiste?
[Gwenn] J’avais 6 ans et j’avais un grand frère qui était sans cesse en train de me taquiner, comme tout grand frère. On jouait ensemble un jour quand il s’est arrêté pour regarder le dessin que je faisais. Son commentaire: « pas mal. » Un compliment de la part d’un critique, il n’y a rien de plus doux, et c’est à ce moment là que j’ai choisi mon chemin.
[E] L’idée que vous en aviez et le résultat actuel sont-ils en cohérence? En quoi diffèrent-ils?
[G] C’est à la fois plus difficile et plus facile que je ne l’avais imaginé. La difficulté est tout le boulot–la créativité dans l’atelier n’est que le début du travail de l’artiste.
En même temps, tout ce qu’il faut faire pour être connu comme vrai artiste est de continuer à créer son art toute sa vie et de le publier régulièrement.
[E] Quelles difficultés pourraient vous faire renoncer?
[G] En 2009, j’ai su que je faisais de l’endométriose, une maladie douloureuse qui touche 10% des femmes et qu’on ne sait pas guérir. Le diagnostic se fait par chirugie qui traite la maladie un peu mais qui finit assez souvent par contribuer à la souffrance d’une femme. Ces 6 dernières années, j’ai eu des moments où je n’étais pas sûre de pouvoir continuer à travailler. Ceci dit, quand on souffre d’une maladie chronique, on a souvent du mal à fonctionner en suivant les horaires des autres, alors peut-être que c’est aussi bien de travailler pour moi-même !
Tout cela pour dire que, si je n’ai pas renoncé jusqu’alors, je doute que je trouverai une raison pour le faire dans le futur.
Vos interlocuteurs
[E] Comment définiriez-vous vos « clients »? Quels sont vos alliés ?
Mon public est généralement des gens qui n’ont pas peur des femmes, du féminisme, et de l’égalité. Après, pour mes alliés, ils sont souvent des défenseurs de la culture libre.
L’économie de votre projet
[E] Quel est votre modèle économique?
Comme tout artiste, j’utilise le « paywall » pour vivre de mon art. J’en parle dans mon livre Art Marketing.
Vous, Gwenn Seemel
[E] Quel type d’études avez-suivi?
À part 4 mois à une école de mime à Paris, j’ai fait toute ma formation aux États-Unis. J’ai eu un diplôme Bachelor of Arts en français, arts plastiques, et l’histoire de l’art. J’ai étudié le français pour lire la littérature qui m’a manqué dans mon éducation américaine et parce que mes parents insistaient. Ils voulaient de me donner la possibilité d’être prof de français si ma carrière d’artiste n’avait pas marché.
[E] Comment vivez-vous votre statut d’artiste?
En général, les gens ne trouvent pas sérieuse l’idée que quelqu’un de vivant est vraiment artiste. Ce n’est pas de leur faute. On ne peut pas convaincre les autres qu’on est vraiment artiste en parlant : il faut tout simplement l’être pendant des années. Comme ça, il n’y a plus d’explications nécessaires !
[E] Pour finir, quel est votre pigment préféré?
L’or « quinacridone ». La recette pour ce pigment a changé récemment (et je crois que le nom a changé aussi) mais la couleur et toutes ses possibilités restent aussi délicieuses. Ce pigment apporte une richesse à n’importe quel mélange de peinture et il a une transparence lumineuse.