Publié le 4 commentaires

Bleue comme une orange

Terre bleue comme une orange paul eluard

Paul Eluard écrit en 1929 ‘La terre est bleue comme une orange’ (totalité du poème retranscrite en fin de note).

Cette image m’a frappée dès la première lecture, le choix des mots est judicieux, ce vers évoque simultanément les couleurs et les formes. Je reste encore interpellée.

De quelle couleur parle-t-on ? Bleu ou Orange ?

Une part de moi trouve cette comparaison étrange, absurde. L’autre part comprend : l’orange citée est le fruit évoqué pour sa rondeur, pour l’énergie qu’il contient. Il ne s’agit pas de la couleur orange.

Et pourtant Eluard nous parle bien de couleur puisqu’il emploi le terme ‘bleu’. Et puis, la couleur de la terre peut être ocre, brune, ou même orange.

Elle est bleue quand on parle de la planète, vue du ciel.

Au moment où il écrit son poème, le premier homme n’a pas marché sur la lune, l’espace ne regorge pas de satellites aux photos époustouflantes diffusées par la NASA sur Internet.

En une phrase, comment peut-on exprimer autant d’idées, évoquer autant de questions?

C’est la poésie.

A l’école, on nous oblige à en apprendre, puis à la commenter.

Et enfin, on oublie.

Parce que la poésie demande du temps et de la réflexion. Mais finalement, il reste tout de même quelques phrases qui continuent de nous habiter.

Puis tout un poème de Paul Eluard

La suite du poème est plus énigmatique, il faudrait quasiment écrire un texte pour chaque vers.

Je nous épargne donc son commentaire complet : nous ne sommes pas à l’épreuve du bac de français !

Et puis la question qui peut venir, comme quand on regarde un tableau qu’on ne comprend pas : l’auteur a-t-il voulu signifier tout ce que les experts et pseudo-experts veulent bien nous faire croire?

Gala est la femme évoquée dans le poème de Paul Eluard. Elle le quittera pour Salvador Dali. Ils se marieront en 1932, et Dali peindra ce portrait d’elle en 1952.

On reste dans le surréalisme avec des moyens complètement différents, la force des mots avec Eluard, la puissance de l’image de Dali.

Et pourtant,  ces deux portraits de Gala me laissent la même impression, la même expression qui, à force de se répéter, finit par devenir réelle : ‘bleue comme une orange’.

portrait de Gala - par Dali


 

La Terre est bleue

La terre est bleue comme une orange
Jamais une erreur les mots ne mentent pas
Ils ne vous donnent plus à chanter
Au tour des baisers de s’entendre
Les fous et les amours
Elle sa bouche d’alliance
Tous les secrets tous les sourires
Et quels vêtements d’indulgence
À la croire toute nue.

Les guêpes fleurissent vert
L’aube se passe autour du cou
Un collier de fenêtres
Des ailes couvrent les feuilles
Tu as toutes les joies solaires
Tout le soleil sur la terre
Sur les chemins de ta beauté.

Paul Eluard, L’amour la poésie, 1929

4 réflexions au sujet de « Bleue comme une orange »

  1. Magnifique poème d’Eluard … et bel article, mais Elize, je me permets de te signaler qu’il s’agit ici d’un vers ( poème) et non d’un ver ( petit animal à corps mou)… . Sophie

    1. Merci Sophie, c’est corrigé :-). Un ver pour un poème qui parle de terre, ça me semblait approprié pourtant. Mais effectivement, c’est mieux avec un ‘s’.

  2. Explication : Le ventre d’une femme enceinte est pareil à la mer (la mère ) et évoque également une orange. Donc la mer évoque ellle aussi une orange. La terre vue du ciel est bleue comme la mer, donc elle est bleue comme une orange. Ce vers merveilleux de Paul Eluard est en quelque sorte la résolution d’une équation surréaliste.
    Dans le même recueil (L’amour la poésie) on trouve d’autres images surréalistes (“Le loup-corail séduit l’épine-chevalière”, “La fraise-rossignol chante son sang qui fume” ) tout aussi fascinantes et en apparence incompréhensibles mais qui recèlent une signification cachée, liée au désir et au subconscient. “L’amour la poésie” reste à mes yeux le meilleur recueil de poèmes de Paul Eluard : plus encore que “Capitale de la douleur” publié trois ans plus tôt, c’est celui où son génie créatif s’exprime le plus librement.

    1. Merci pour cette analyse. Les interprétations sont aussi très belles. En poésie, comme sur des tableaux, elles peuvent être multiples et c’est ce qui constitue la grandeur d’une oeuvre.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *